Je reviens tête basse, honteuse, car j’ai péché. Péché par orgueil. Ca n’empêche qu’en y allant, j’avais les intestins à l’envers et la gorge nouée. Mais j’avais confiance. Un peu.
Je ne suis pas mauvaise perdante –excepté pour les tablettes de chocolat qui ne sont pas partagées équitablement– et j’ai reconnu tout de suite ma défaite.
J’ai chié mon oral.
Alors que j’avais pourtant mis mes chaussettes jaune porte bonheur. Je comprends pas.
Faut dire que je faisais un peu tâche, parmi les autres nanas, toutes habillées de noir bien ajusté au corps. Avec ma chemisette à carreaux que même mon beau-père m’a pris pour une bûcheronne ; oui, sans doute que je manquais de crédibilité. Mais pour travailler avec des enfants, d’Heidi ou Catwoman, qui tu embauches ? Ni l’une ni l’autre ? Oui, moi aussi, avec le recul c’est ce que je me dis.
Et les deux femmes qui composaient mon auditoire, que se sont-elles dit ? Après un échange de regards consternés, très certainement : « elle est gentille. »
Oui, je suis gentille, dans le genre inadaptée et incapable de communiquer.
Pour l’oral, il me fallait une photo d’identité. Le matin même je vais donc me faire tirer le portrait chez le photographe de la galerie marchande.
« Ca fera 7 euros. » Je me dis que c’est quand même trois euros de plus qu’au photomaton d’en face. Je lui donne un billet de dix, elle me rend 2 euros et 10 cents.
Je ne suis pas super forte en math mais je pense « tiens, c’est bizarre. Elle a du confondre la pièce de 10 cents avec celle de 1€. Faut vraiment qu’elle change de lunettes. »
J’ai rangé la monnaie et je suis partie. Plus légère de 7.90€, et avec, en prime, ma tignasse décoiffée en 4 exemplaires.
Oui, je suis gentille, dans le genre inadaptée et incapable de communiquer.
Mais est-on plus heureux lorsqu’on a dit « pardon mais vous ne m’avez pas rendu assez. » ?
Dans ce cas, la vendeuse aurait reconnu son erreur en se justifiant d’une phrase bateau genre « on a arrosé la promotion de mon mari hier soir, et je ne suis encore pas bien réveillée. » Ce à quoi, par politesse il faut répondre un « ha, ça…les petites fêtes… » tout platonique. Et bien excusez-moi mais tout ça ne vaut pas 90 cts alors très peu pour moi. Je préfère les lui laisser et filer.
La crise ? J’ai pas de boulot, je la connais pas la crise.
Enfin être gentille, même si ça provoque des scènes de vie surréaliste, ça rempli pas une vie…
Qu’est ce que j’vais faire aujourd’hui ?
Qu’est-ce que j’vais faire demain ?
C’est c’que j’me dis tous les matins.
Qu’est-ce que j’vais faire de ma vie ?
Moi j’ai envie de rien
J’ai juste envie d’être bien.
Chantait plaintivement Marie-Jeanne en essuyant les verres derrière son comptoir de L’Underground Café.
Provisoirement, je sais pas trop ce que je vais faire non plus (en plus d’articles pourris, je
veux dire) mais dès que j’ai fini de déprimer, promis, je reviendrai pour vous faire rire.
Touches pas à ma maman toi !