Pour la première fois, la semaine dernière, j’ai séparé Arthur de sa maman pendant plus de 72h. En effet j’ai passé le 31en Haute-Savoie avec mon fils pendant qu’Anne-Claire, au fin fond de la Loire, se creusait la cervelle deux jours durant pour nous pondre un article intitulé « Bonne résolution ». Quand on voit le texte bâclé et pessimiste qui a suivit, on peut se dire que c’est au galop que sont revenues les habitudes fâcheuses de 2008. Mais bon là n’est pas le propos et je ne suis pas du genre à dire du mal de la femme que j’aime à en devenir absurde. J’ai donc pendant trois jours testé la monoparentalité et franchement, moi qui suis d’un naturel plutôt angoissé, là on peut dire que j’ai carrément craqué mon slip. Tout avait pourtant si bien commencé. En effet Arthur était souriant, énergique, gourmand et ne semblait pas le moins du monde souffrir du manque transitoire d’amour maternel. Papy, mamie et tonton Jules étaient comblés et moi j’étais plutôt confiant. Puis au troisième jour, peu après le gouter, vint l’heure du départ et des premières quintes de toux. Le soir même Arthur refusa de finir son biberon et à 1h30 du matin c’est un extraordinaire vomissement qui me réveilla en sursaut. Et là, c’est le drame… Je ne sais pas si c’est le fait que je sois seul avec lui pour la première fois ou bien le fait que le thermomètre affiche 39.5 mais toujours est-il que l’idée que le pire soit à venir n’a pas fait que me traverser la tête. Je le doit même avouer, elle s’y est installé durablement. N’écoutant que mon stress j’attrape Arthur par la capuche direction les urgences. En moins de cinq minutes nous arrivons à l’accueil où une infirmière dévouée introduit délicatement un remède dans l’anus de mon fils. Mais il n’est pas sauvé pour autant car commence alors d’interminables heures d’attente. Je suis pour ma part un peu moins sous le choc et mon cerveau émotionnel cesse de monopoliser mon champ de conscience. Je m’autorise alors à analyser la misère de la situation. Devant mes yeux mi-clos des dizaines d’enfants attendent comme Arthur dans une insoutenable indifférence. La déshumanisation institutionnelle propre aux établissements publics est pour moi l’une des pires conséquences de notre organisation sanitaire où l’individu est nié au profit d’un numéro de chambre, d’une étiquette ou même d’un code barre. Bref, il est maintenant 3h45, Arthur dort dans mes bras (dans la précipitation j’ai oublié la poussette) et seulement trois enfants sont passés devant l’interne. Je décide donc de rompre, non sans culpabilité, le cercle vicieux de l’attente car partir c’est accepter que l’on a merdé sur toute la ligne. Mais comme je ne suis pas à ça près, je signe la décharge me permettant de quitter ce lieu de désolation sans passer par la case consultation. Nous avons donc terminé notre nuit dans notre lit et le lendemain même si Arthur semblait atteint de toxoplasmose et était incapable de se mettre debout j’ai compris que le plus dur était passé. Ma belle mère a finit de me rassuré en me disant qu’Arthur, à bientôt 9 mois, n’était plus en sucre. Pour conclure, car je me rends compte que je ne l’ai pas fait courte; sur ce coup là j’ai été un peu nigaud. Mais si c’était à refaire, même s’il est une source inaltérable d’angoisse, je le referais.